• DE DEUX FONDEMENTS ESSENTIELS DE NOTRE PATRIMOINE

    Le patrimoine de nos civilisations est immense, quel que soit l'aspect considéré : intellectuel, historique, musical, pictural... ou encore gastronomique et, là, voyez la culture du vin dans toutes ses dimensions : sensorielle, scientifique, culturelle, symbolique et anthropologique.

    Mais ce grandiose édifice, dont nous pressentons tous qu'il est aujourd'hui gravement menacé (et pour certains il s'agit, ni plus ni moins, de la survie de l'espèce  ), sur quoi repose-t-il en définitive ? Je livre ici mes convictions d'homme qui a librement navigué sur l'océan des idées et des réalités, interrogeant ici et là les personnes capables d'étancher sa soif de  comprendre, lisant et relisant, confrontant les thèses des uns et des autres à la réalité concrète. Je retiens deux fondements essentiels, l'un est naturel (il s'agit du monde vivant), l'autre est culturel (et concerne donc la pensée et l'action humaine). L'un ne peut aller sans l'autre...

    Le premier fondement du monde humain est la globalité du monde vivant et d'abord la fécondité des sols vivriers : je dois à Birre, Pfeiffer et à bien d'autres, jusqu'à Claude Bourguignon, de l'avoir compris et intégré. C'est la raison de mon rejet d'une agriculture destructrice des équilibres naturels et d'un système économique qui stérilise chaque année des millions d'hectares de sols agricoles. C'est aussi pourquoi  mon choix de l'agriculture dite biologique est un "impératif catégorique", pourquoi ma résistance à la folie de la  société de production-consommation est irréductible. 

    Mais ce monde est ce que l'humanité en a fait. C'est pourquoi le second fondement concerne notre façon de fonctionner, liée à nos émotions, nos préjugés, nos représentations mentales, nos pensées conscientes... J'ai dit ailleurs (dans "la Quête du vin") l'importance décisive du mode de connaissance. Force est aussi de constater à quel point, sur la planète entière, l'imaginaire humain est largement captivé par les miroirs aux alouettes de l'économie néo-libérale, et prisonnier de ses pièges. Cette logique est de domination. Qu'elle soit suicidaire ne l'empêche pas de continuer à se déployer, avec la complicité des classes politiques mais aussi celle des citoyens, dont la servitude est trop souvent volontaire !

    Résister à la logique du système aliénant est d'abord affaire de conscience individuelle mais, pour aboutir à un changement, doit s'appuyer sur des projets collectifs. Cependant, je fuis tous ceux qui ne reposent pas d'abord sur la conscience aigüe des conditions élémentaires d'un "vivre-ensemble" harmonieux, c'est-à-dire sur des valeurs-en-acte universelles. La première s'exprime par l'adage : "Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te fasse" (la formulation positive est bien sûr meilleure). La seconde est le respect de la parole donnée, qui assure la solidité de l'engagement. La troisième, la bienveillance envers soi-même comme envers autrui, bienveillance étendue aussi au monde vivant.

    Je regrette que cette éthique ne soit pas davantage incarnée dans nombre de structures et de projets alternatifs. Il s'agit souvent de changer des dispositifs techniques, en éludant tout changement radical dans la manière d'être et de faire. Mais tout est lié. Et la question du SENS se pose enfin à de plus en plus d'humains...

    Bref ! Pour ma part j'essaie, pour le temps qui me reste à vivre, de me conformer à mes convictions. Enfin, adopter la "sobriété heureuse", comme le suggère Pierre Rabhi, n'empêche pas le bon vin !

    TRINK !

     Pierre Paillard


  • Commentaires

    1
    bruno FREMONT
    Mercredi 3 Décembre 2014 à 10:30

    Par rapport à cette évocation de la fécondité des sols vivriers et par conséquent de l'émergence de l'agrobiologie :à noter un superbe numéro 100 de NATURE et PROGRES  pour ses 50 ans qui retrace les différentes étapes et les acteurs.

    PRECIEUX!

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